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V1-Chapitre 5 : Linvocation des molosses

  La main tremblante de Georges s’élève lentement, ses doigts crispés. Autour de son index, une bague d’argent, ternie par le temps, semble frissonner sous son toucher. Il inspire profondément, puis libère son mana.

  Le métal frémit, réagissant aussit?t. Un léger tintement résonne dans l’air. Puis, un déclic sec. Une fine aiguille jaillit, plus rapide qu’un serpent, et s’enfonce dans la chair de son doigt. Une vive douleur le traverse. Georges serre les dents, contraint d'endurer. Une perle de sang, épaisse et écarlate, gonfle à la surface de sa peau avant de glisser lentement sur l’anneau.

  Dès qu’elle touche le métal, un frisson glacé remonte le long de son bras. La bague absorbe le liquide vital, comme une bête assoiffée. Une onde invisible se propage dans l’air, ébranlant le silence.

  Un frisson traverse Annabelle, cachée dans la calèche derrière son oncle. Elle retient son souffle.

  Les deux molosses sculptés sur l’anneau s’animent. Leurs yeux de pierre rouge se consument d’une lueur écarlate, et au creux de leurs iris, de minuscules cercles d’invocation se révèlent, gravés avec une précision inhumaine.

  Un battement sourd résonne dans le sol. Puis un second. Comme un c?ur gigantesque, tapi sous terre.

  Une brèche s’ouvre devant Georges.

  L’espace se déchire en une faille béante, aspirant la lumière autour d’elle. Un vortex noir s’étire pour former une ellipse, telle une ombre vivante. Son centre est une abysse insondable, un néant d’où s’échappe une brume épaisse, grasse et froide.

  Deux lueurs bleutées pulsent dans l’obscurité, des battements lents et mena?ants.

  Puis, un pas. Lourd. Résonnant. Un second qui suit.

  Deux chiens titanesques émergent lentement du portail, courbant l’échine pour en franchir l’arc. Ils se redressent dans un silence parfait, imposants, chacun aussi haut qu’un homme adulte au garrot.

  Leur pelage est d’un noir absolu, une fourrure tissée de ténèbres qui semble absorber la lumière.

  Les créatures avancent à pas mesurés, sans empressement, leur souffle profond soulevant des volutes de vapeur blanchatre.

  Leur cage thoracique est dépourvue de chair, leurs c?tes dessinent une prison d’os autour d’un c?ur nu. Un organe noir et luisant qui bat à découvert, projetant un liquide bleuté dans les veines qui s’y rattachent à chaque pulsation.

  Les molosses s’arrêtent devant Georges. Leurs yeux ardents se lèvent vers lui, indifférents. Rien, dans leur posture, ne trahit la moindre inclination à répondre aux ordres d’un ma?tre.

  Un étaux semble lui serrer la gorge et son souffle se coupe. Il s’attendait à une soumission au moins partielle, mais il ne voit, dans ces prunelles br?lantes, qu’une lueur froide. Une attente… ou un jugement. Georges déglutit, sa respiration devint légèrement saccadé.

  Et s’ils refusaient d’obéir ? Et s’ils se retournaient contre lui ?

  Ces créatures n'étaient liées à aucun contrat, aucun serment de sang, juste un seau sur leur coeur dont elles n'avaient visiblement pas conscience. Elles étaient là parce qu’elles avaient répondu à son appel de leur plein gré… mais leur loyauté restait incertaine.

  Les battements des c?urs exposés s’intensifient, un rythme à peine plus rapide, mais suffisant pour trahir une impatience grandissante. Un léger grondement, à peine audible, vibre dans leur larynx.

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  Georges serre les poings pour empêcher ses mains de trembler. Il n’a pas le choix. Il doit leur donner une raison de l’écouter… avant qu’ils ne décident qu’il serait plus intéressant de le déchirer en lambeaux.

  Un silence pesant s’abat, et il se demande si c'était vraiment une bonne idée. Mais il était à court de solutions pour achever le monstre qu’est devenue Amandinne. Heureusement, ce genre de créature infesté de vers est leur nourriture favorite.

  Le portail se referme dans un bruit de succion, avalant les derniers lambeaux de brume.

  Les molosses attendent, observant leur supposé ma?tre.

  Le silence pesant fut brisé par un rale inhumain.

  Amandinne se tenait là, de retour à la lisière de la forêt, une silhouette décharnée sous l’éclat blafard de la lune. Son habit de nonne n’était plus qu’un linceul crasseux, déchiré, souillé de sang et de suintements fétides. Son visage, autrefois bienveillant, n'était plus qu’une ruine, une machoire crispée d’où dégoulinaient des filaments visqueux. Son corps grouillait. Sous sa peau distendue, des formes rampaient, s’agitaient, déchirant l’enveloppe humaine qui ne contenait plus qu’un amas de vermine enragée qui la contr?laient.

  Elle bougea d’un soubresaut saccadé, ses membres se tordant dans des angles impossibles. Ses obittent vides se fixèrent sur Georges et Annabelle avec une absence terrifiante. Puis, un spasme violent la traversa. Sa chair explosa en un fracas éc?urant. Une nuée de vers noirs jaillit, s’écrasant au sol dans un clapotis humide avant de ramper frénétiquement vers leur proie.

  Georges recula frénétiquement, retenant son envie de vomir. Mais il n’eut pas le temps de réfléchir.

  Les molosses bondirent sans prévenir.

  Ils se ruèrent sur la monstruosité. L’un des chiens agrippa le bras déformé d’Amandinne, refermant ses machoires avec une force brutale. Un craquement sinistre retentit, mais aucun cri ne s’échappa de la chose qui fut autrefois une femme. Son autre bras fouetta l’air, et ses doigts allongés comme des serres s’enfoncèrent dans la fourrure de l’autre molosse, arrachant des lambeaux de chair noircie.

  Un jappement furieux résonna. Le molosse blessé recula d’un bond, son c?ur exposé pulsant frénétiquement. Son frère, lui, ne lacha pas prise. Il secoua violemment la carcasse, démembrant cette loque de chairs en putréfaction.

  Mais Amandinne ne dépendait plus de ses membres. Elle se tordit sur elle-même, sa colonne vertébrale se cambrant à l’extrême, et bondit avec une vitesse surnaturelle vers Georges.

  Il n’eut que le temps de lever son bras.

  Les griffes déchiquetèrent sa manche et entaillèrent sa peau. Il lacha un grognement, reculant en trébuchant, mais son regard restait rivé sur elle. Il attendait.

  Le deuxième molosse fondit sur la créature dans un élan brutal. Ses crocs s’enfoncèrent dans ce qui restait du torse d’Amandinne, mais cette fois, elle éclata en une masse grouillante. Les vers s’écoulèrent en torrents, s’enroulant autour du chien infernal, s’infiltrant dans sa cage thoracique béante.

  L’animal convulsa. Son c?ur noir pulsa violemment, comme s’il rejetait l’intrusion. Il s’arracha à la masse grouillante, haletant. Mais les parasites s’accrochaient à lui, rampant sous sa peau en creusant des tunnels, cherchant à le consumer de l’intérieur.

  Georges ne pouvait pas se le permettre.

  D’un geste vif, il arracha un éclat de métal de son brassard et le planta dans sa plaie saignante. Le sang coula, plus abondant. Il le projeta d’un geste sec en direction du molosse infesté.

  Le seau de protection sur le coeur de la bête, laissé par l'ancêtre qui les avait élevé, s’activa.

  Une onde violente secoua l’air. Le molosse gémit, son corps tremblant sous la contrainte du lien. Son c?ur battit une dernière fois… puis explosa en une gerbe de flammes noires.

  Une onde de chaleur souffla la nuée de parasites, carbonisant les vers en un instant. Le molosse, lui, tituba, fumant… mais vivant. L’instant d’après, il se redressa, complètement inconscient qu'il venait d'être sauvé malgré lui et prêt à frapper de nouveau.

  Amandinne n’était plus qu’un amoncellement de restes calcinés et de lambeaux convulsants. Mais quelque chose, dans cet amas de chairs putréfiées, se reforma. Un noyau sombre, luisant, pulsait au centre des vestiges. Les restant de vers qui rampait sur le sol tentaient de s'éloigner et de se sauver.

  Georges n’hésita pas. Il tendit la main, et le molosse indemne comprit.

  Dans un grondement sourd, la créature bondit une dernière fois. Ses machoires se refermèrent sur le noyau qui explosa dans sa gueule.

  Le silence retomba et le chien se lécha les babinnes comme si rien ne s'était produit, fixant les vers au sol avec avidité.

  Des cendres noires volèrent dans l’air. Les restes d’Amandinne disparurent en poussière.

  Georges resta figé un instant, son souffle court. Puis, lentement, il baissa la main. Les molosses s’assirent, attendant enfin un ordre.

  Le combat était terminé.

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